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Thomas Frognall Dibdin, Voyage bibliographique, archéologique et pittoresque en France, traduit par G. A. Crapelet, 1825
Vivant Denon

Le monde entier connaît le célèbre Denon, le voyageur en Égypte, l'éditeur du grand ouvrage des Antiquités égyptiennes, publié en 1802, en deux magnifiques volumes in-folio. Comme vous possédez un exemplaire de l'ouvrage français (1), avec de très bonnes épreuves, je ne vous dirai rien sur ce sujet, si ce n'est que je regarde cet ouvrage comme l'un des plus beaux qui est paru en son genre, sous le rapport de l'art ; mais l'auteur avait encore d'autres droits à la considération et à la faveur du public. Il fut l'ami intime... et certainement le confident secret de Bonaparte, dans tous les projets qui avaient rapport à l'acquisition de tableaux et de statues, et certainement il remplit avec habileté la tâche qui lui fut confiée. Là-dessus, je désire écarter toute question de droit. Il avait près de soixante ans lorsqu'il suivit son maître dans l'expédition d'Égypte, ce qui prouve au moins, et son énergie et les sentiments qui l'animaient en cette circonstance. Mais Denon a beaucoup voyagé en Europe ; il est entré dans tous les cabinets publics et particuliers, et a rapporté dans sa patrie les fruits nombreux de ses recherches, qui sont en même temps des preuves de son goût. Sa maison, sur le quai Malaquais, est le rendez-vous de tous les amateurs anglais qui ont des lettres de recommandation ; et c'est rendre justice à M. Denon de dire que jamais personne ne supporta avec plus d'aisance et de meilleure grâce les petits inconvénients qui doivent fréquemment résulter de sa facilité à recevoir tant d'étrangers dans sa maison. J'ai quelquefois trouvé ses salons remplis de messieurs et de dames anglaises ; et un jour, par hasard, je me trouvais à la tête de vingt-deux personnes, parmi lesquels étaient trois officiers anglais, et un plus grand nombre de membres de nos deux Universités. J'avouerai qu'en nous recevant, il me tira doucement à l'écart pour me faire cette observation "Mon ami, quand vous viendrez une autre fois, ne commandez pas, je vous prie, une armée si nombreuse, je m'imaginerais encore être en Égypte ;" ce qui était encore plus embarrassant, c'est qu'il se trouvait déjà une autre compagnie anglaise et aussi nombreuse que la nôtre. Il ne me fit cependant aucune autre réprimande sur mon indiscrétion. Nous avons échangé deux fois nos cartes de visite avant de nous rencontrer. La carte de Denon méritait bien d'être conservée, comme témoignage de la modestie de celui qui l'avait remise. Elle ne portait que son nom seul, Denon, d'où l'on pouvait conclure qu'il n'y a qu'un Denon (2). Le propriétaire de la collection dont je vais vous donner la description est certainement un peu passé (3) en années ; mais sa physionomie annonce une bonne constitution et une bonne santé. Il a les yeux petits, gris et brillants ; les dents blanches et régulières. Il est ordinairement habillé de noir, et toujours comme un homme de bon ton. Il est d'une taille moyenne, bien prise. Sa démarche est à la fois légère et assurée ; ses manières sont tout-à-fait prévenantes. Comme il n'entend nullement l'anglais, il ne peut ni le lire, ni le parler. Un de mes amis lui avait remis une lettre de M. S* B*, qu'une dame de notre société lui lut sur le champ, et Denon (qui a toujours une vive et respectueuse affection pour l'auteur de cette lettre) s'attacha plus particulièrement à cette dame pendant tout le temps de notre visite. Il est vrai qu'elle fit des remarques pleines de justesse sur la collection. Je vais maintenant vous donner une idée de ce curieux cabinet. On monte par un escalier en pierre, grand et commode (ce qui n'est pas commun à Paris), et l'on s'arrête au premier : autre avantage fort rare à Paris ; car "donnez-vous la peine de monter au second, ou au troisième, ou quatrième," n'est que trop souvent la réponse de M. le concierge, lorsqu'on demande la demeure de quelqu'un. La collection occupe une demi-douzaine de pièces spacieuses, aérées, et bien meublées, comme vous allez le voir. La plupart de ces pièces ont vue sur la Seine. La première renferme des bustes en bronze, et des tableaux de Téniers, de Watteau, et de l'école moderne de Paris. Parmi ces tableaux, le Watteau est plus remarquable par sa grandeur que par son mérite. Les deux Téniers sont légers et brillants ; deux esquisses de cochons et d'ânes sont de précieux morceaux de cet artiste. Dans un coin est placée une momie de femme renfermée sous glace, et dont les tégumens sont conservés dans un panier. On regarde cette pièce comme également rare et curieuse. M. Denon en montre, avec un air de triomphe et une satisfaction admirable, le pied, qui n'est absolument que muscles et os. Il le regarde comme aussi beau que celui de la Vénus de Médicis ; mais il ne faut pas disputer ici des goûts. Parmi les bustes se trouve celui de West, de Neckar, et celui de Denon lui-même, que j'appellerai Denon premier. La seconde pièce contient une admirable collection de curiosités phéniciennes, égyptiennes, et autres de l'Orient ; et dans le coin, à gauche, est un meuble à tiroirs, rempli de médailles fort curieuses dans tous les genres, et des personnages les plus remarquables, principalement du seizième siècle. Au-dessus du médaillier est un portrait du propriétaire de la collection, que je nommerai Denon second. Cette pièce offre une variété d'objets fort intéressants. Du côté de la cheminée sont placés plusieurs bustes, dont les plus remarquables sont ceux de Pétrarque et de Voltaire ; le premier en bronze, le second en terre cuite, chacun de grandeur naturelle. La physionomie de Pétrarque est tellement insignifiante, qu'on ne peut s'étonner que Laure n'ait pas répondu à sa passion. Le buste de Voltaire nous parut le meilleur de tous ceux qui existent. Il est plein de caractère et offre un mélange étonnant de malice, d'esprit et de génie (4).
La troisième pièce est plus grande, et la plus richement ornée de peintures. Suivant mon faible jugement, un petit tableau ovale de la Sainte-Famille, du Guerchin, me paraît l'emporter sur tout le reste. Les Ruisdaël et Both sont très inférieurs. En approchant de la cheminée, l'attention est vivement attirée vers une petite figure de bronze, en pied, qui représente Bonaparte, appuyé contre une table, et la main droite posée sur son front (6). Des cartes et un compas sont sur la table. Je crois qu'il est représenté dans sa chambre, pendant sa traversée en Égypte. Y a-t-il ici quelque autre figure qui le représente, dans la même situation, à son
retour ? Quoi qu'il en soit, l'exécution de celui-ci est admirable. C'est aussi dans ce salon (si je m'en souviens bien), que se trouve encore un buste de l'ex-empereur, en marbre blanc, par Canova. Il est représenté plus fort que nature, la figure jeune, et les joues un peu creuses. Les bustes de Louis XVIII et du duc de Berry sont aussi dans la même pièce, comme pour contrebalancer l'effet du premier ; mais ceux-ci ne sont qu'en plâtre. Je n'omettrai pas de vous dire qu'il y a encore ici un portrait du propriétaire, qui sera, si vous le voulez bien, Denon troisième. On entre ensuite dans une espèce de petit boudoir qui renferme, à mon avis, les morceaux les plus précieux et les plus curieux que possède le baron Denon, sous le rapport de l'art. C'est une suite des productions de la peinture des différentes écoles, depuis le commencement de la renaissance de l'art jusqu'à l'école qui a précédé l'école actuelle. Cette suite commence par ce qu'on appelle les Giotto et Cimabué, et finit par un superbe tableau d'un groupe d'enfans, ouvrage d'un artiste français (7), mort précisément avant que notre Reynolds se fût fait connaître. On croit très réellement que ce dernier tableau est sorti du pinceau de sir Joshua lui-même. Parmi les productions de l'ancienne école, je remarquai particulièrement la tête de Pisani, le premier graveur en médailles du quinzième siècle, peinte par Antonello de Messine, élève de Jean Van Eyk. Cette tête est pleine de naturel et de caractère. Je ne pouvais m'en détacher. "Serait-il possible d'obtenir une copie de cette peinture ?" demandais-je au propriétaire. "Je vous entends, répliqua-t-il, vous désirez emporter cette copie dans votre pays, et l'y faire graver ? - Très certainement, ajoutais-je. - C'est à votre service ; Laurent la copiera admirablement." Je savais à peine comment exprimer mes remercîmens à M. Denon (8).
Il y avait une autre tête... ; mais
non omnia possumus omnes, je veux parler de celle d'une femme, vue de profil, pleine d'expression, peinte par Masaccio. "Quoi ! me dit M. Denon, voulez-vous aussi une gravure de cette tête ? Elle est déjà retenue, et par moi-même. Enfin, tout ce que vous voyez dans ces pièces (y compris même votre favori Pisani) sera lithographié dans ma collection, que je publierai." En conséquence de sa déclaration, je dus m'observer. Mais il se trouvait encore une chose, dont je voyais, dans cette collection, une telle variété, que M. Denon ne pouvait m'en refuser une copie. Qu'était-ce donc ? Un portrait de lui-même, en marbre, à l'huile, ou en émail. "Choisissez, me dit-il, faites ce que vous voudrez ;" et il fut convenu que M. Laguiche ferait un dessin du buste en marbre blanc (sculpté, je crois, par Bosio), qui est d'une ressemblance parfaite. Il y a encore un grand et magnifique portrait de Denon, revêtu de toutes ses décorations, et peint sur émail par Augustin et c'est peut-être le plus parfait en ce genre qui existe en France de cet artiste. Il y a déjà quelques années qu'il est fait, et alors Denon avait les joues plus pleines et plus de feu dans les yeux. Nous pouvons donc dire que cette salle renferme Denon quatrième et Denon cinquième.
Dans la même pièce, on remarque une fort belle pièce manuscrite sur papyrus, apportée d'Égypte. Toutes les curiosités qu'on apporta de ce pays (comme il est facile de le supposer) sont nécessairement précieuses et en grand nombre ; mais mon attention se porta sur des objets de l'art plus
intelligibles. En face du buste de Denon est placé celui de son ancien maître, l'ex-empereur, en bronze ; et au-dessus de ce dernier est un petit tableau de Lucas Cranach. Il représente un mendiant qui demande l'aumône à une femme (9). Il y a une expression forte dans ce tableau. Cette pièce, ou une autre voisine (j'ai oublié laquelle), contient la collection des gravures de Marc-Antoine, ou de Rembrandt, ou de tous les deux ; collection qu'on dit être sans égale. Je ne saurais dire laquelle de ces deux collections est la plus précieuse, ou si l'une et l'autre sont supérieures à celle que possède notre British Museum des mêmes maîtres. Je demandai un matin à jeter un coup d'oeil sur ces Rembrandt. Nous étions seuls ; nous venions de déjeuner ensemble. M. Denon me fit voir deux différentes épreuves du Paysage au carrosse, et deux grands Coppenol avec fonds blancs, différents un peu l'un de l'autre. "C'est assez, m'écriais-je en élevant les deux mains, vous surpassez tout ce qu'il y a en France et en Angleterre."
De là on entre dans une quatrième pièce, qui est la chambre à coucher de M. Denon. Près de la cheminée on voit un grand nombre de jolies petites productions de l'art du dessin. Il y a entre autres de petits
Watteau précieux, que surpasse encore, à mon avis, un petit Sébastien Bourdon, sujet de Sainte-Famille. Dans un coin un peu trop sombre, se trouve un petit portrait du Parmegiano, vu de profil, plein d'expression, et qui , ce me semble, n'a jamais été gravé. Ce sont là, je crois, les bijoux de prix de cette chambre à coucher, si j'ajoute encore quelques petits bronzes anciens, et un émail ou deux de Petitot. On revient alors sur ses pas, et l'on passe dans une cinquième pièce, garnie de bons tableaux assez modernes, et dans laquelle se trouvait, si je ne me trompe, un portrait à l'huile (10) du propriétaire, auquel je donnerais le nom de Denon septième (11). C'est ici que le maître de la maison se tient habituellement, et c'est ce qu'il appelle son atelier. Ses tiroirs et ses portefeuilles sont probablement remplis de gravures et d'anciens dessins, dont le nombre est immense, et, suivant M. Denon, d'une valeur inappréciable. On passe encore dans une autre chambre un peu moins bien garnie, ou en déshabillé. Entre autres gravures, j'ai remarqué celle de feu M. Pitt, d'après le portrait en pied d'Edridge. Une particularité assez singulière, c'est que cette gravure fut trouvée à bord de la première prise (une frégate) que firent les Français dans la dernière guerre ; et le capitaine pria M. Denon de l'accepter. Je vis aussi dans la même pièce, si je m'en souviens bien les gravures de M. Fox et de lord Nelson (12) ; mais ce qui attira surtout mon admiration, mêlée presque d'un sentiment d'incrédulité, ce fut de voir trois ou quatre grandes gravures, d'après Rembrandt et Potter, que M. Denon m'assura être des productions de son propre burin. J'avais de la peine à le croire ; c'était néanmoins la vérité. Quelles que soient les opinions de M. Denon sur les beaux-arts, comme antiquaire ou comme juge de l'époque actuelle, personne, à moins d'être aveuglé par les préjugés, ou animé par une antipathie nationale, ne lui refusera un beau zèle, un grand talent, et un grand jugement pour tout ce qui embrasse les arts : sa magnifique collection prouve évidemment qu'il possède toutes ces qualités.
Je vous ai ainsi rapidement conduit à travers les pièces qui contiennent un si grand et si précieux assemblage de tableaux, de bustes, de bronzes, de curiosités antiques, de dessins, d'estampes, qui ne sont pas seulement la propriété de M. Denon, mais, j'ai presque dit, de tout le monde. Toujours on peut aller visiter ces trésors ; on est sûr d'en trouver un accès facile, et d'y être reçu avec une parfaite urbanité. "Mais, allez-vous dire, cet amateur célèbre n'a-t-il pas une collection de livres, une bibliothèque ? - Il a bien au moins un Missel ou deux ? Voilà tout, mon ami ; mais de bibliothèque, point ; car de même que "une seule hirondelle ne suffit pas pour annoncer l'été," de même que trois ou quatre solides volumes avec miniatures ne constituent pas une bibliothèque. Cependant tout ce qu'il possède en ce genre m'a été montré, et a été l'objet de quelques notes que j'ai prises sur les lieux mêmes : les voici.
Je vis d'abord un petit Missel, très joliment exécuté en caractères gothiques, de forme italienne, dans le genre de feux de Jenson et d'Hailbrun. Les miniatures du Calendrier sont fortement endommagées. Sur le dernier feuillet de ce calendrier, on lit la note suivante, imprimé en capitale romaine DEUM TIME, PAUPERES SUSTINE, MEMENTO FINIS. Sur le verso du feuillet suivant est une grande tête de Christ, supérieurement peinte ; mais la partie inférieure de la figure est relativement beaucoup trop petite, semblable sous ce rapport à une figure du même genre qui se trouve dans un Missel du duc de Devonshire, que j'ai décrit dans un autre ouvrage (13). Le Crucifiement, deux feuillets après, est une peinture d'un grand effet, et bien touchée. Viennent ensuite les
drôleries ; c'est une suite de sujets des plus bizarres ; mais d'une exécution charmante. On ne peut trouver rien de plus parfait en tout point que les animaux, les oiseaux, les insectes, les fruits et les fleurs qui en font partie. Le Vélin, par sa couleur et sa qualité, en relève admirablement l'éclat. Il s'y trouve plusieurs miniatures d'assez grandes dimensions comparativement au livre ; quelques-unes avec de très petites figures, et deux (l'une de Saint-Jean Baptiste, et l'autre du Christ injurié) qui sont d'une grande force de couleur ; les initiales sont bien composées, et délicatement touchées. Ce volume en miniatures n'a que quatre pouces de haut sur deux pouces neuf lignes de large environ. Il est relié en velours rouge, avec les garnitures en argent, orné de tête de chérubins. Il est fermé par une agrafe d'argent sur laquelle est peinte une tête de Christ, que je crois de la même époque. M. Denon me dit que c'était en Italie qu'il avait acheté ce petit bijou 400 francs, à un libraire.
Il possède un autre Missel d'un demi pouce à peu près plus haut et plus large que le précédent, dans une reliure ancienne, avec des ornements estampés. Les marges sont garnies de fleurs, de fruits et d'oiseaux, touchés avec beaucoup de grâce et de vérité. Plusieurs bordures ont un fond d'or, relevé de brun, sur lequel se déploient richement les fruits, qu'on croirait être en relief. D'autres sont ornés de figures, et rien ne surpasse celle qui entoure le sujet de la Tentation de nos premiers parents : elle est vraiment digne d'être copiée ; mais non en
lithographie ! Elle se trouve sur le quarante-cinquième feuillet. Une des têtes de la bordure ressemble à celle de votre roi Edouard VI. Le troisième volume manuscrit avec miniatures, qui appartient à M. Denon, est peut-être le plus précieux de tous. C'est un volume in-4°, écrit en espagnol, qui porte la date de 1553. L'écriture est en lettres rouges et noires alternativement. Ce volume renferme plusieurs grandes miniatures, et des bordures coloriées ; et M. Denon m'a dit que c'était ce livre même sur lequel on prononçait les sermens d'initiation à l'inquisition d'Espagne. Il est dans un état de conservation parfaite. Le premier grand sujet peint représente un Saint, dont le crâne est partagé en deux par une épée ; le sang en coule abondamment. Une palme et trois couronnes sont dans sa main droite ; dans sa gauche est un livre, au haut duquel on lit Exurge, Domine, et judice causam tuam. Le Saint est entouré d'une bordure de fruits et de fleurs. C'est la plus belle miniature du volume. Il est dans sa première reliure, en cuir noir, avec des ornemens estampés, des garnitures et des agrafes. On lit en marge cette note manuscrite Ynoscan obligados asseruier cagome off.° de ella salbo si de su volundad loquisier en servi.
Mais ce n'est là qu'une partie des trésors en livres du baron Denon ; mais très probablement ce sont les meilleurs morceaux de sa collection de livres avec miniatures. Avec les occasions qui ont dû s'offrir dans les pays étrangers, il n'est peut-être pas très extraordinaire que monsieur Denon, homme de goût, et investi d'un caractère public, soit parvenu à former une collection tous genres, telle que nous la voyons. Mais il faut louer ceux qui méritent des éloges. Denon pouvait consacrer son temps et son argent à des acquisitions beaucoup moins recommandables. Il pouvait également déshonorer son goût et son caractère par des actes mal entendus de spoliation et de rapacité (14). Tout ce qu'il a fait, en général, a été bien fait ; et l'urbanité et l'obligeance avec lesquels il ouvre son cabinet, et fait voir toutes les curiosités qu'il renferme, méritent la reconnaissance de tous les amateurs étrangers ou indigènes. Il n'y a pas longtemps qu'il a exécuté quelque chose d'assez bizarre. Il s'est représenté lui-même dans cette période de sa vie, depuis son enfance jusqu'à sa vieillesse. Ces représentations sont décrites sur une espèce de drapeau attaché aux bois de la faux que tient le Temps, les ailes déployées. Une Folie se saisit de son sablier. Plus bas, il caresse encore Cupidon. Le fond représente un paysage couvert de neige. Denon a lithographié ce sujet, et m'en offrit une épreuve sur un papier de couleur, qu'il avait retouchée au crayon. C'est une sorte de capriccio qui ne mérite ni louange ni blâme. L'auteur ne s'est rien moins que flatté dans la plupart des portraits qu'il a faits de lui-même.

NOTES DU TRADUCTEUR

1. Il a été traduit en anglais, et publié en Angleterre, dans un format inférieur pour les planches et le texte. Mais on en a fait une réimpression avec un volume de planches in-folio, paru aussi en 1802. Peu d'ouvrages dans le temps eurent une plus grande vogue, ou reçurent un accueil plus flatteur.
2. Ces mots sont imprimés en français dans l'ouvrage anglais.
3. Ces mots sont également en français dans l'original.
4. Ce buste, en terre cuite, a été modelé d'après nature, par Pigalle. Il a servi de modèle à la tête de la statue de Voltaire qui est dans la bibliothèque de l'institut.
5. C'est un Ruisdaël de la plus grande beauté ; et monsieur Denon, ainsi que tous les connaisseurs, le mettent au rang des tableaux les plus précieux.
6. Ce n'est pas cela : la main droite, qui tient un compas, est posée sur la table ; la main gauche était appuyée sur la cuisse gauche.
7. Ce tableau est de Procaccini.
8. Entre autres échantillons du talent de Pisani pour la gravure en médailles, M. Denon possède une tête de P. CANDIDUS, STUDIORUM HUMANITATIS DECUS. Elle est en bronze, la tête vue de profil. Au revers, autour d'un livre ouvert auquel sont suspendus plusieurs glands, on lit : OPUS PISANI, PICTORIS. Serait-ce le même P. Candidus, qui a traduit l'Histoire grecque d'Appien, dont Vindelin de Spire a publié la première version latine en 1472, in-folio ? Cela me paraît très vraisemblable.
9. C'est au contraire un homme qui tient une bourse pleine, et qui cherche à tenter une jeune femme.
10. Peint par M. Robert Lefèvre.
11. Cette énumération affectée des portraits de M. Denon ne s'accorde guère avec ce que monsieur Dibdin a exprimé ci-dessus, à propos de la carte de visite de cet amateur distingué.
12. Il n'y a point de Nelson.
13 Voyez Bibliographical Decameron, tome I, page 97.
11. Etrange manière de louer ! Il est vrai que monsieur Dibdin s'applaudit fort d'être resté seul dans une bibliothèque sans que sa conscience ait aucun reproche à lui faire (Voyez, ci-après, Lettre XXXV, sur Strasbourg). 

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