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Chereau, couverture

 

Achille Chéreau, Catalogue d'un marchand libraire
du XVe siècle tenant boutique à Tours...
avec notes explicatives, Paris, Académie des Bibliophiles, 1868

Achille Chéreau (1817-1885), médecin bibliophile est l'auteur de quelques études sur la médecine et la bibliophilie. Il a retrouvé, dans une bibliothèque, un inventaire datant du XVe siècle d'un libraire inconnu de Tours. Il a complété cette simple liste de notes explicatives, biographiques, bibliographiques et de commentaires.
En 4ème page de couverture, on lit ce texte : "Ce livre fut imprimé... sous le numéro vingt-sept de la Collection de l'Académie des Bibliophiles par D. Jouaust, son imprimeur-juré, rue saint-Honoré à Paris".

100 x 160 mm, 1868, 66 pages
Tiré à 300 exemplaires numérotés

Présentation | Préface | Texte | Bibliographie




Préface

Depuis que M. Barrois a fait imprimer la Librairie protypographique des fils du roi Jean (1830, in-4°), on a senti l'intérêt considérable qui se rattache à ces sortes de publications, qui sont comme l'inventaire des connaissances et des idées à des époques plus ou moins éloignées de nous.
Aussi, d'autres bibliophiles, d'autres scrutateurs des temps passés, ont-ils marché dans cette voie.
Nous connaissons maintenant les manuscrits qui ont appartenu à Louis de Bruges, seigneur de la Gruthuyse ; les livres qui composaient la Bibliothèque du Louvre en 1373, et qui furent inventoriés par Gilles Mallet ; ceux, ou au moins la plupart de ceux que les ducs de Bourgogne avaient pu rassembler au XVe siècle ; ceux de Charles d'Orléans à son château de Blois, année 1427 ; ceux des seigneurs de Jaligny, année 1413 ; ceux du château de la Ferté, en Poitou ; nous pouvons dire les ouvrages qui faisaient les délices du duc de Berry à son manoir de Mehun-sur-Yèvre, et de Charles, comte d'Anjou, au Château de Cognac : la bibliothèque de François Ier à Blois nous a ouvert ses portes ; Pierre Cardonnel, célèbre médecin de Paris au commencement du XIVe siècle, nous a fait gracieusement entrer dans sa petite librairie de trente ouvrages, la plupart de médecine. Enfin M. Douët-d'Arcq vient de publier pour la Société des bibliophiles l'inventaire de la bibliothèque de Charles VI.
Nous publions aujourd'hui un autre inventaire, qui se recommande par des qualités non à dédaigner.
Il est du XVe siècle.
Il contient deux cent soixante-sept numéros, se référant tous à des livres en français.
Il se divise en deux parties: livres «  escripts à la main » et livres « en impression ».
Il semble être le catalogue d'une maison de librairie tenant boutique à Tours, « devant l'hostel monseigneur de Dunois ». Le libraire, qui commençait à être forcé par la mode à tenir des livres imprimés, était probablement le propre copiste des manuscrits qu'il mettait en vente. Ce qui le ferait croire, c'est que tous sont des ouvrages contemporains ou à peu près et, dans le cas où ils sont plus anciens, ceux-là continuaient à être à la mode à ce moment. Par là il représente bien son époque, et probablement aussi ses copies étaient-elles faites non sur parchemin, mais sur papier, comme la presque totalité des manuscrits de la seconde moitié du XVe siècle. D'ailleurs, ce catalogue est riche, surtout en romans, en livres de chevalerie et en mystères qui ont fait la joie de nos aïeux.
Seulement, cet inventaire a le grand inconvénient d'être très-succinct, d'indiquer les ouvrages avec une désolante brièveté, et de négliger plusieurs détails,- la forme de l'écriture, la reliure, l’appréciation de la valeur etc.,- qu'on rencontre quelquefois dans les catalogues de ce genre.
Il était donc nécessaire d'ajouter à chaque rubrique des notes explicatives. C’est ce que nous avons fait en nous aidant des renseignements déjà acquis, en faisant appel à l'immense érudition de M. Paulin Paris, et en priant M. Anatole de Montaiglon de voir et de corriger les épreuves; il a fallu l'œil vigilant et exercé du savant professeur de l’École des Chartes pour que des erreurs d'appréciation ne se glissassent pas dans nos notes.
L'inventaire que nous publions fait partie de l'inépuisable collection des manuscrits de la Bibliothèque de la rue Richelieu, et y occupe le volume 2,9 : 2 du fonds français (autrefois fonds Béthune, n° 8, 452). M. Le Roux de Lincy le connaît bien et l'a, en partie, mais sèchement publié à la page LXX de son introduction à l'édition qu'il a donnée (1841, 2 vol. in-l2) des Cent Nouvelles nouvelles.
Le nom de ce libraire, qui tenait boutique à Tours, "devant l'hostel monseigneur de Dunois", reste ignoré. Mais il n'est pas téméraire de supposer que ce comte de Dunois était: François, Ier du nom, comte de Dunois, de Longueville, deTancarville, gouverneur du Dauphiné, grand chambellan de France, fils du bâtard d'Orléans, et qui, mort le 25 novembre 1491, laissa de sa femme, Agnès de Savoie, trois fils qui continuèrent l'illustration de leur père. Nous pouvons même, grâce à un renseignement de M. Grandmaison, l’archiviste d'Indre-et-Loire, être tout à fait affirmatif sur l'emplacement de l’hôtel DUNOIS. Il était situé aux lieux mêmes où les Jésuites établirent au XVIIe siècle leur Collége et bâtirent une église qui subsiste encore. On ne sait comment il était venu entre les mains des Dunois, mais le Bâtard d'Orléans, le fils du duc Louis qui avait les comtés de Dunois et de Longueville, le possédait à l'époque de sa mort en 1468. En 1517, Mme Louise de Savoie, mère du Roi, qui l'avait acquis des héritiers de François, en fait cadeau à Jacques de Beaune Semblançay, alors son bon ami; l'hôtel prend le nom d'hôtel de Beaune, et, après avoir passé dans les mains de deux ou trois propriétaires, arrive en 1634 dans celles des Jésuites. On voit que notre libraire demeurait dans le beau quartier de la ville.

Paris, juin 1868.