Pierre de Lostal ou L'Hostal (XVIe-XVIIe siècle), éléments
de biographie
"Pierre
de l'Hostal, sieur de Roquebronne, Sendos et Maucor, est un personnage
singulier sur lequel on n'a pu recueillir que des renseignements très-incomplets.
On sait qu'il était né dans le Béarn au 16e siècle
[plus précisément en Basse-Navarre], et qu'il remplissait
la charge de vice-chancelier de Navarre [à partir de 1587 ou 1597.
En 1611, sous Louis XIII, il obtient des lettres d'anoblissement pour
sa maison d'Orocolo, située à Saint-Palais. En 1621, il
obtient un office de conseiller d'état]. Il avait embrassé
la réforme de Calvin, dont il ne cessa jamais de se montrer l'un
des plus zélés partisans. C'était d'ailleurs, au
jugment de Scaliger, un bravache et un étourdi ; le cardinal Duperron
le traite d'homme le plus impertinent qu'il fût possible de trouver
; enfin Bayle le nomme un fou. Il est connu par quelques ouvrages que
les amateurs recherchent avec empressement pour leur singularité
; ce sont :
1° Discours philosophiques, desquels est traité de
l'essence de l'âme et de la vertu morale, Paris, 1579, in-8°
2° Le Soldat français, 1604,1606, in-8°.
Le but de cet écrit est d'engager Henri IV à faire la guerre
à l'Espagne, pour l'obliger à rendre la Navarre. On y trouve
d'assez bonnes choses, mais mal exprimées et sans ordre : l'auteur
étale d'ailleurs une érudition fastueuse, et appuie tous
ses raisonnements de citations latines. Cet ouvrage fut vivement critiqué
par un ligueur caché sous le nom de Maître Guillaume. On
peut conjecturer que ce fut L'Hostal lui-même qui répondit
par la Victoire du soldat français contre Maître Guillaume
(1606, in-12), et l'Anti-Thersite, ou Réponse à Maître
Guillaume s'adressant au roi, 1606, in-12.
3° L'avant-victorieux, Orthez,
1600 [sic] ; Bordeaux, 1610, in-8° très-rare [il y a
erreur sur la première date : il n'existe aucune édition
en 1600]. C'est l'éloge de Henri IV, mais écrit du style
le plus extravagant. L'auteur le dédie à la France par un
défi à tous les écrivains de son temps :
"Face mieux qui pourra, me voici à l'après d'abatre
l'image d'un grand Roy, pour, en l'image de ses faits, faire voir au monde
tous ses ennemis abattus. Jay n'agueres paru en Soldat & Chevalier
François : je veux un jour triompher en Victorieux. Et si j'ai
le vent aussi bon que le coeur, peu de plumes auront le coeur de se mettre
au vent. Qu'on juge du Lion par l'ongle, & face mieux qui pourra."
[Nous suivons l'orthographe de l'époque]
Le passage suivant, dans lequel il s'excite à redoubler de zèle
pour célébrer dignement les vertus de Henri, suffira pour
donner une idée de son style et de sa manière : "En
l'air, ma plume ; en l'air ! deux et trois, trois et quatre, quatre
tirades et plus s'il le faut ; tirades à centaines, quintes sur
quintes, élans sur élans, à l'honneur de ce grand
roi !". Et les mots, en l'air, ma plume ! en l'air, reviennent jusqu'à
huit fois dans le morceau le plus court de l'ouvrage.
[Barbier mentionne 3 éditions la même année]
4° La Navarre en deuil, Orthez, 1610, in-12. C'est une
plainte sur la mort de Henri IV. Cet ouvrage est rare et recherché.(W.-s)"
[5° On lui attribue aussi
L' Anti-Guisart, (La Rochelle, Pierre Haultin) Imprimé nouvellement.
M.D.LXXXVI, in-8, 126 p. ]
Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne,
1843.
Nous avons ajouté les textes entre crochets.
Extrait
de Jugemens des savans sur les ouvrages des auteurs... d'Adrien
Baillet, 1725, sur l'Anti-soldat français
"Je passerai aussi sur l'Anti-Soldat François imprimé
l'an 1604 parce que j'ai lieu de douter que vous voulussiés le
reconnoître pour un Anti personnel du caractère des
autres. Je n'ai jamais vu cet Ouvrage qu'en passant le long des Quais,
mais je ne me souviens plus de ce que j'en ai lu. D'autres que moi pourront
vous dire si l'Auteur en vouloit au Soldat françois d'un certain
Pierre de Lostal ou Laustaut Sieur d'Estrem, qui vivoit du tems de Henri
IV & que Scaliger vouloiot faire passer pour un fou."
La
société béarnaise au dix-huitième siècle : historiettes tirées des mémoires
inédits d'un gentil homme béarnais publ. pour la Société des bibliophiles
du Béarn, Pau, L. Ribaut, 1876
"[...] Ce Lostal fit une espèce de plainte intitulée
la Navarre en deuil ; on l'imprime. Il y exprime ses regrets d'une manière
assez extravagante. Il s'étoit d'ailleurs fait connoître
précédemment par un autre ouvrage intitulé le Soldat
Suédois. Je ne le connois que parce que le père Bouhours,
jésuite, dans sa Manière de bien penser sur les ouvrages
d'esprit, cite celui-ci comme tout ce qu'il y a au monde de plus saugrenu,
et pour qu'on en juge mieux, il ajoute que les quatre premiers mots sont
: "Ma plume en l'air". [Le gentilhomme béarnais ou le
père Bouhours se sont emmêlés les plumes : c'est bien
à la fin de l'Avant-Victorieux que
l'on trouve l'expression citée].
C'est, ce me semble, dans le Perroniana que ce Lostal occupe un
article aussi peu flatteur, et qu'il est qualifié de vice-chancelier
de Navarre, seigneur de Sendets et Maucor. En effet, il eut ces deux terres,
et peut-être quelque autre, par son mariage avec la fille unique
héritière du sieur de Lamothe [...]"
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