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Fr.-Et. Gouge de Cessières, L'art d'aimer, 1770 :

François Etienne Gouge de Cessières (1724-1782?)
(extrait de Michaud, Biographie universelle)

Il suivit d'abord la carrière des armes et se rendit ensuite à Lisbonne, en qualité de gouverneur du duc de Cadaval, près duquel il resta cinq ans. De retour dans sa patrie, il [...] fut pourvu de la charge d'avocat du roi au siège présidial de Laon.

En 1758, il composa un poème intitulé les Jardins d'ornement ou les Géorgiques françaises, Paris, in-8°. Dédaignant de s'occuper de l'agricultue, en tant qu'elle a pour objet "le labourage, les vignobles, les potagers, les étables, etc., parce que ces matières ont été amplement décrites par Hésiode, Virgile, Rapin et Vanlère, j'ai embrassé, dit-il dans sa préface, la partie que ces grands auteurs ont laissée". Malheureusement l'écrivain qui s'annonçait avec de si hautes prétentions est resté au-dessous de la tâche qu'il avait entreprise. Impassiblement didactique, il n'a pas su, comme ses modèles, varier la monotonie des préceptes par des digressions épisodiques nées du fond du sujet. Il a mieux réussi dans les détails techniques, qu'il a rendus quelquefois de manière heureuse. L'élégance de l'expression y relève le mérite de la difficulté vaincue ; mais en général le ton de couleur de l'ouvrage, trop uniforme, accuse un défaut d'imagination qui est mortel pour les compositions poétiques. On conçoit qu'en 1758 l'auteur n'ait pas parlé de la révolution opérée dans l'art des jardins par Kent et ses imitateurs : le genre irrégulier était encore peu connu en France ; mais il n'a même pas accordé une mention à Lenostre, le créateur du jardin des Tuileries ! Les grandes espérances qu'il avait fondées sur le succès de son ouvrage ne se réalisèrent pas. En vain publiait-il partout qu'il avait le premier doté notre littérature d'un poème géorgique, il n'obtint aucune récompense du ministère. Aussi fut-il obligé, par quelque revers de fortune, de vendre sa jolie terre de Cessières. Il se plaignit bien de cette triste nécessité dans une épigramme où il se compre modestement à Virgile :
"Quand Virgile aux Romains donna ses Géorgiques,
..........
Il se vit accablé de présents magnifiques ;
Auguste lui bâtit un superbe palais,
Et moi-même le premier, sur semblables matières
Lançai, jeune encor, mes crayons dans Paris
.........
........ Je viens de vendre mes Cessières."

A la suite des Jardins d'ornement, Gouge a publié, sous le titre de Poésies philosophiques, in-8° de 96 pages, des odes d'un rythme trop uniforme, des épigrammes assez innocentes, et une Epitre sur les ressources du génie, où l'on attaque plusieurs réjugés littéraires. Il y a quelque facilité dans la versification de cette dernière pièce, mais le sujet n'est qu'effleuré ; et en cherchant à détruire ce qu'il appelle les préjugés littéraires, l'auteur émet plus d'une opinion paradoxale. Il a découvert, par exemple, que les ouvrages de Molière et de la Fontaine fourmillent de fautes contre la langue (note, page 14), et que nous n'avons point de vraies élégies dans notre langue (note, page 15), oubliant que ce même La Fontaine en avait fait une admirable sur la détention de Fouquet. Il est plus dans le vrai lorsqu'il refuse le titre d'églogues aux prétendues idylles de madame Deshoulières, imitées du roman de l'Astrée, et aux pastorales de Fontenelle, pures scènes d'opéra.

On doit encore à Gouge de Cessières l'Education, poème, Paris, 1757, in-8°, et l'Art d'aimer, poème héroïque en quatre chants, Paris, 1745, et Amsterdam, 1757, in-8°, et réimprimé en six chants, Londres, 1759, in-8°, et Avignon, 1787, in-12. Les critiques d'alors trouvèrent ce nouvel Art d'aimer plus décent que celui d'Ovide. Que n'en avait-il les grâces et le voluptueux abandon ! L'auteur traduisit en vers français le Remède d'amour, du poète latin. Quelques mauvais plaisants dirent, comme on l'a dit plus tard de la traduction de Saint-Ange, que c'était un remède contre l'art d'aimer. On ne connaît pas la date précise de la mort de Gouge de Cessières : à partir de 1782, on le voit remplaceé par un autre titulaire dans sa charge d'avocat du roi au présidial de Laon (Voir Etet de la magistrature en France, Paris, 1788, in-8°, p. 466).

 


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