Document manuscrit soigneusement calligraphié du XIXe siècle concernant une transaction passée devant notaire en mai 1824. Les deux parties s’opposent sur une rente perpétuelle à payer pour un moulin et ses dépendances.
Ce type de contrat était assez fréquent et se retrouve dans les archives. La rente perpétuelle consiste surtout en céréales, en viande et en volaille.
On trouve souvent le mot modure (voir en particluier en page 7) que le Glossaire du centre de la France du comte Jaubert définit ainsi :
« Mouture ou moudure : mélange de froment, de seigle et de marsèche [dans notre cas, de l’orge]. Le meunier à moitié moudure est celui qui, n’ayant pas de moulin, va de village en village recueillir des blés pour les conduire chez un autre meunier ayant moulin, avec lequel il partage la redevance. »
Gannat est une petite ville du département de l’Allier, en Auvergne. Elle comptait dans les années 1820 environ 5000 habitants.
Il est question d’une rente perpétuelle définie ainsi dans un ouvrage de droit de l’époque, Des Contrats de vente, d’échange, de prêt et de rente par Julien Michel Dufour de Saint-Pathus, 1823 : »Le contrat de constitution de rente perpétuelle peut être défini un contrat par lequel l’un des contractans vend à l’autre une rente annuelle et perpétuelle, dont il se constitue le débiteur, pour un prix licite convenu entre eux, qui doit consister en une somme de deniers qu’il reçoit de lui, sous la faculté de pouvoir toujours racheter la rente lorsqu’il lui plaira, pour le prix qu’il a reçu pour la constitution, et sans qu’il puisse y être contraint. »
Transcription
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Titre nouvel portant transaction entre Madame et Messieurs Bertrand et Claude Dejoux et autres du 21 mai 1824
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Blanche
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Louis par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre à tout présent et avenir Salut faisons savoir que Par devant Amable François Rabusson Devaure et son collègue notaires royaux à la résidence de Gannat, département de l’Allier, soussignée
Furent présens 1° Claude Dejoux meunier domicilié au lieu de moulin de plagne, commune de Saint Germain de Salle, département de l’Allier et Marie Dejoux sa femme qu’il autorise pour la validité des présentes.
2° Jean Dejoux, meunier, domicilié au dit Moulin de Plagne et Françoise Dejoux sa femme qu’il autorise pareillement pour la validité des présentes.
3° Et Pierre Dejoux, Meunier, domicilié au Moulin de Crotte, Commune de Marjet, sur dit département de l’Allier.
Le dit Claude Dejoux et sa femme, Jean Dejoux et sa femme et Pierre Dejoux, agissant
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tant en leurs noms personnels, que comme se faisant et portant forts pour Jacques Dejoux, ancien meunier, et pour François Dejoux dit Biscuit, garçon meunier, tous deux domiciliés au dit Moulin de Plagne.
Tous les susnommés tenus au service de la rente et à l’accomplissement des obligations ci-après reconnus, soit comme héritiers et représentans de défunts Gilbert, François et Joseph Dejoux, soit comme propriétaires et détenteurs des immeubles affectés et hypothèques à la dite rente et aux dites obligations ;
Lesquels Claude Dejoux et sa femme, Jean Dejoux et sa femme et Pierre Dejoux, ez qualités qu’ils procèdent, conjointement et solidairement un d’eux seul pour tetouts (??).
Reconnaissant devoir et s’obligent à payer à Madame Gabrielle-Salneuve Veuve de Monsieur Claude-Bonnet Bertrand, en son vivant propriétaire domicilié en la ville de Montaigne, Département du Puy-de-Dôme et aux enfans et héritiers du dit défunt sieur Claude-Bonnet Bertrand, qui sont 1° Monsieur Pierre-Germain Bertrand, notaire Royal à la résidence de la dite ville de Gannat y domicilié, 2° Monsieur Guillaume-Gilbert
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Brice Bertrand propriétaire sans profession domicilié au lieu de font Violant, dite commune de Saint Germain de Salle, 3° Et Monsieur Christophe-Ambroise-Edouard-Bertrand, employé aux douanes, domicilié à Belfort, département du haut Rhin, n’acceptant pour lui-même que pour la dite dame Veuve Bertrand sa mère et pour ses deux frères susnommés, le dit sieur Pierre-Germain Bertrand ici présent et qui se porte fors pour sa mère et ses frères ;
Une rente annuelle et perpétuelle consistant 1° en six septiers de blé modure ou mixture, mesure de Charroux, ce qui correspond à sept hectolitres huit décalitres mesure actuelle, 2° en la moitié d’un cochon de la valeur de Douze livres, cette moitié étant de six livres ou cinq francs quatre vingt treize centimes, 3° En une somme de vingt livres ou dix neuf francs soixante quinze centimes 4° et de la moitié d’une oie grasse ; la dite rente payable, savoir : le blé modure ou mixture par Douzième et par mois, c’est-à-dire un demi septier ou six décalitres et demi par mois, la moitié de cochon et les vingt livres argent, moitié le vingt quatre juin et l’autre moitié le vingt quatre décembre de chaque année et enfin la moitié d’oie grasse le dit jour vingt
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quatre décembre de chaque année.
De plus les dits Claude Dejoux et sa femme, Jean Dejoux et sa femme et Pierre Dejoux, ez qualités qu’ils procèdent reconnaissent que le dit Moulin de Plagne est tenu à perpétuité ou en d’autres termes qu’ils sont tenus à perpétuité, comme détenteurs de ce Moulin 1° de moudre au dit Moulin et sans aucune rétribution ni indemnité tout le blé nécessaire à la consommation de la maison de font Violant, qu’à cet effet ils doivent venir prendre le blé en question à la maison de font Violant et l’y rapporter dans le même jour après l’avoir converti en farine, de telle sorte que la personne envoyée par le propriétaire de font Violant pour être présente au moulage soit toujours reconduite avec la farine au lieu de font Violant avant la nuit close . 2° de fournir au propriétaire de font Violant, toutes les fois qu’il voudra pêcher sur la rivière de Gioule, la sentine [Bateau plat servant à transporter le sel ou à passer une rivière] ou nacelle du moulin de Plagne et un homme pour la conduire, s’il s’en trouve au dit Moulin.
Sont et demeurent réservés à la veuve et aux
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héritiers Bertrand tous les arrérages de la rente ci-dessus qui sont presentement dus et ??, lesquels arrérages des dits Dejoux se soumettent à payer à partir de la dernière quittance qui leur a été donnée et sans pouvoir opposer la prescription de cinq ans.
Il est convenu entre les partis et ce comme condition expresse de la transaction ci-après stipulée que la modure ou Mixture à fournir par M. Dejoux, soit pour les arrérages à échoir à l’avenir, sera un mélange des trois espèces de blé que produit le pays et qui sont propres à faire du pain, c’est-à-dire de froment, de seigle et d’orge et que chacune de ces trois espèces entrera dans le melange par égale portion et par tiers.
Les dits Dejoux reconnaissent d’ailleurs que la modure ou mixture qui a été livrée, pour le service de la rente en question, au dit défunt Claude-Bonnet Bertrand et à ses devanciers.
Titre constitutif
La rente et les services perpétuels ci-dessus
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reconnus furent créés originairement par contrat ??? Vaure notaire, présence des témoins, le seize mai seize cent vingt un, le dit contrat contenant bail à rente du Moulin de Plagne et dépendances par Pierre de Constance sieur de Font Violant à Gilbert Peyret de saint Cyprien, moyennant 1° une rente annuelle et perpétuelle de douze septiers de blé modure, mesure Charroux, d’un pourceau valant douze livres et d’une oie grasse , 2° les services perpétuels ci-dessus reconnus, 3° l’obligation de tenir dans la rivière de Sioule un panier à pêcher et de partager avec le propriétaire de font Violant le poisson provenant de cette pêche, 4° et diverses autres charges, notamment celle de payer aux religieux et Abbé de Saint Gilbert, en l’acquit du propriétaire de la terre de Font Violant une rente annuelle et perpétuelle consistant en trois septième froment et trois septième seigle, mesure de Saint-Pourcain, vingt cinq livres de chanvre et deux quartes d’hypoires (??).
Reconnaissances successives et conventions particulières
Par acte reçu Guyard et son collègue notaire
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à Gannat le dix-neuf février mil sept cent vingt, controle à Gannat le même jour Gilberte Lafaye veuve et commune de Gilbert Dejoux, tutrice de leurs enfans mineurs et Joseph Dejoux son fils majeur se soumirent Comme detenteur du Moulin à ??? au profit du sieur Guillaume Bertrand sieur de font Volant toutes les obligations résultant du dit contrat de bail à rente du seize mai mil six cent vingt un ; seulement quant à la rente consistant en blé modure, pourceau et oie grasse ils ne s’obligent à lui en payer que la moitié.
Par une transaction sus prou (??) passée devant Chartier notaire, présence de Lemoine le onze avril mil sept cent vingt quatre, contracté à Chantelle le quinze du même mois, entre le dit sieur Guillaume Bertrand et la dite Gilberte Lafarge et son fils, l’obligation imposée aux propriétaires du Moulin de la Plagne de tenir dans la Sioule un panier à pêche fut convertie en une rente annuelle et perpétuelle de vingt livres à payer et servir par eux au propriétaire de font Violant.
Par acte reçu Gosse et son collègue notaires à Jenzat le quatorze avril mil sept cent soixante cinq controlé à Jenzat le vingt du même mois, Jean
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Dejoux dit Chatel et Francoise Gournillat veuve et commune de Christophe Dejoux et tutrice de leurs enfans mineurs, reconnurent au profit de Claude Bonnet Bertrand sieur de font Violant la rente consistant en six septieme de ble modure ; la moitié d’un cochon valant douze livres, vingt livres argent, et la moitié d’une oie grasse ; en outre ils se soumirent à toutes les obligations imposées aux détenteurs du Moulin de Plagne, par le contrat de bail à rente du seize mai seize cent vingt un et non abrogées par la transaction sus datée.
Enfin par acte de ?? Collin et son collegue notaires à Gannat le huit decembre mil sept cent quatre vingt treize, enregistré à Gannat le vingt un frimaire an deux et protant transaction, Gilbert Dejoux, meunier de Plagne faisant tant pour lui que pour Jacques, François et Josph Dejoux, ses frères Germains et Communs, reconnut au profit du sieur Claude Bonnet Bertrand, second du nom et père du propriétaire actuel de la terre de font Violant la rente annuelle et perpétuelle composée de six septiemes de blé modure, la moitié d’un pourceau valant douze livres, vingt livres argent et la moitié d’une oie grasse, en outre et s’obligent aux services perpétuels reconnus par les presentes. Quand à la rente perpétuelle ci-devant payable à l’abbaye de saint Gilbert, il se soumet à en garantir et indemniser la propriété de font Violant.
Hypotheques
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Sont et demeurent maintenus, pour assurer le service de la rente et autres obligations reconnues par les présentes, les hypothèques générales et spéciales resultant soit du titre originaire soit des reconnoissances et traités qui ont suivi ; notamment l’hypothèque spéciale qui frappe sur le Moulin de Plagne, situé commune de Saint Germain de Salles et sur les dépendances de ce moulin, telles que maison d’habitation du meunier, jardin, batimens d’exploitation, iles, saulées, vernières et Béal (??).
Transaction
Par exploit de Conchon huissier à Gannat, en date du seize août mil huit cent vingt deux, enregistré à Gannat le dix neuf du même mois le veuve et heritiere Bertrand sus nommée formèrent contre les propriétaires du moulin de Plagne susnommés une demande judiciaire tendante 1° à ce que les detenteurs du Moulin de Plagne fussent tenus de payer à la veuve et heritiere Bertrand la rente annuelle et perpétuelle ci devant payable à l’abbaye Saint Gilbert
2° à ce qu’il fut dit et ordonné que la modure ou mixture à fournir par les propriétaires du moulin de Plagne pour le service de la rente par eux due aux propriétaires de font Violant serait composé d’un tiers de fromant, d’un tiers de seigle, et d’un tiers d’orge
3° à ce que les dits dejoux fussent condamnés à payer à la veuve et heritiere Bertrand les arrérages échus à l’époque de la demande, tant de la rente ci devant payable à l’abbaye de saint Gilbert que celle due aux propriétaires de font Violant.
4° à ce que les dits Dejoux fussent condamnés à passer titre nouvel et reconnoissance au profit de la veuve et
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reconnoissent qu’au moyen de la reconnoissance de rente et services perpetuels ci-dessus consentis ils se trouvent satisfaits relativement à tous leurs autres chefs de demande [ici note ajoutée : La conséquence l’instance introduite par l’exploit de demande] dudit jour seize août mil huit cent vingt deux sera et demeure pour toujours ainsi que tous procès mû ou à mouvant quand à ce , entre les parties
Article 3. Chaque partie supportera et paira les frais qu’elle fait dans l’instance qui a été ouverte par la dite demande.
Article 4. Les presents auront force de transaction sur procès entre les parties qui déclarent que telle est leur volonté et le sieur Pierre Germain Bertrand s’oblige personnellement à faire ratifier les dites présentes par la dame sa même et par son frère sus nommés pour tous dommages envers les dits Dejoux
Article ?? et dernier. Les frais des présents seront supportés par les dits Dejoux qui en fourniront une premiere grosse à la dame Veuve et heritiere Bertrand.
Fait et passe à Gannat en l’étude, en présence de Me Antoine Collon Lacombe avoué licencié près le tribunal de première instance de Gannat y demeurant, conseil des dits Dejoux lequel ainsi que
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Monsieur Bertrand a signé avec les notaires quand aux autres comparses ils ont déclaré ne le savoir, après lecture faite le vingt un mai mil huit cent vingt quatre.
A la minute ont signé Collin Lacombe, Bertrand Roux l’ainé et Mabusson Devaure ces derniers notaires.
Au bas est ecrit, enregistré à Gannat le vingt trois mai mil huit cent vingt quatre folio vingt, recto cases une et deux. Reçu pour la reconnoissance et la transaction six francs soixante centimes dixième compris signé Tavernier.
Mandons et ordonnons a tous huissiers sur ce requis de mettre le present acte à exécution à nos procureurs royaux d’y tenir la main et a tous commandans et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Grosse délivrée à Moudis sieur Bertrand Rabusson Devaure.