Ce texte décrit l'état de la technique en 1884.
Laissons-le dormir, en attendant qu'on vienne prendre les feuilles pour les porter chez le relieur, et pensons à autre chose. Occupons-nous, par exemple, du sort de ces formes qui ont servi à l'imprimer.
Toutes ces lettres, par mille, par centaines de mille, qui ont été assemblées pour le composer, il faut maintenant les séparer, leur rendre la liberté... pour qu'elles puissent servir a composer un autre livre. Ces a, ces e, ces m, etc, qui m'ont servi à vous faire savoir comment on fait un livre, - ils vont être dispersés... que dis-je ? ils sont déjà partis ! Où sont-ils ? Qu'en va-t-on faire ? Je n'en sais rien, Chose bizarre à penser : peut-être sont-ils, dans ce moment, employés à former les pages d'un livre d'histoire - ou celles d'un livre de poésie ; peut-être vont-ils aller exprimer les idées graves, sérieuses, d'un savant, dans quelque livre de science ; ou bien, qui sait ? narrer les aventures absurdes d'un conte à dormir debout! - Eh bien, n'est-ce pas justement là l'invention merveilleuse des caractères mobiles, qui permet de les combiner de mille et mille façons différentes, successivement, pour rendre les pensées les plus diverses ? © Textes rares |